L’association

1872 : création de la Maison Verte

1870. la Commune de Paris. C’est dans ce contexte que naît la Maison Verte, Fraternité de la Mission populaire évangélique, dans le18e arrondissement.

            Suite à la répression de l’insurrection ouvrière, le pasteur écossais Robert Mac All décide de créer une Mission populaire évangélique «parmi les ouvriers de Paris » dans le 18e arrondissement. C’est une modeste salle d’évangélisation. On y vient après le travail, chercher soutien contre l’alcoolisme, apprendre à lire et à écrire.

            Peu à peu,  la Mission populaire évangélique essaime et, pour analyser et résoudre les difficultés des personnes, elle développe une réflexion plus politique sur le contexte social. Vers 1890, chacun de ces 136 lieux en France prennent le nom de Fraternité.

             Jusqu’à aujourd’hui, la Maison Verte, Fraternité de la Mission populaire évangélique poursuit la mission d’être un lieu où croyants et non-croyants agissent ensemble pour la justice et l’égalité des droits.

1960-1972 : la Maison Verte solidaire des luttes de son temps

De gauche à droite : Jean-Paul Sartre, Michel Foucault et Charly Hédrich, pasteur de La Maison Verte

Le mercredi 27 octobre 1971, Ben Ali Djellali, quinze ans et demi, adolescent d’origine algérienne, est abattu d’une balle dans la nuque, à la suite d’une altercation, par le concierge de son immeuble, rue de la Goutte d’Or. Relayée notamment par le Secours Rouge du 18e, et l’agence de presse Libération dirigée par Maurice Clavel, l’information déclenche une mobilisation inédite contre « l’intoxication raciste comme politique d’Etat». Elle va révéler à l’opinion publique la réalité des conditions de vie des travailleurs immigrés. Une commission d’enquête est lancée par le comité Djelali qui, aux côtés de son initiateur Michel Foucault, regroupe notamment Gilles Deleuze, Jean Genet et Claude Mauriac. Le pasteur de La Maison Verte, Charly Hédrich, est sollicité pour accueillir leurs réunions à la Maison Verte, connue pour avoir reçu le comité Vietnam et la Fédération anarchiste. Jean-Paul Sartre se joint au groupe et c’est à la Maison Verte qu’il rencontre pour la première fois Michel Foucault.  « Paris, samedi 27 novembre 1971. Jean Genet, non rasé, le poil blanc et très dru. Michel Foucault. Et, dans cette salle de la rue Marcadet où nous nous réunissons, vers quatorze heures, pour mettre au point les derniers détails de la manifestation, l’arrivée d’un petit homme, vieilli, discret et qui ne dira presque rien : Jean-Paul Sartre. Il s’asseoit en face de moi qui suis entre Genet et Foucault. Ai-je mal vu, mal compris, mais il me semble qu’on les présente l’un à l’autre, qu’ils se voient pour la première fois, Jean-Paul Sartre et Michel Foucault… » Claude Mauriac, Et comme l’espérance est violente, Grasset, 1976

De gauche à droite : Philippe Gavi,Jean-Paul Sartre, Jean-Claude Vernier, Serge July et Jean-René Huleu.

Par la suite, le Pasteur Charly et Verène Heidrich travailleront avec les militants de la gauche prolétarienne, et accueilleront la chapelle ardente de Pierre Overney, militant maoïste abattu par un vigile de Renault. Moins d’un an plus tard, se déroule à la Maison Verte la conférence de presse qui préfigure le lancement du journal Libération.

1943 : Jean Joussellin, Juste parmi les Nations

Une plaque est posée à l’entrée de l’immeuble 127/129 rue Marcadet en mémoire de Jean Joussellin, pasteur de La Maison Verte.

                La grande rafle du Vélodrome d’Hiver a lieu en juillet 1942. À Paris, les arrestations de juifs se multiplient. C’est en septembre 1942 que Jean Joussellin  est nommé pasteur de la Maison Verte. De nombreux enfants du quartier, de toutes confessions, y viennent le soir après l’école, le jeudi et le dimanche pour des activités récréatives.

                Vient l’été 1943. Des parents sont venus demander à Jean Joussellin et Renée David, la responsable du groupe scout des Eclaireurs, d’organiser un séjour pour les enfants pendant les vacances scolaires.

                Les scouts Éclaireuses et Éclaireurs de France possédent un château, à Cappy dans l’Oise, près de Compiègne.  Jean Joussellin et Renée David y conduisent une centaine d’enfants.

                En septembre, les enfants juifs ne rentreront pas à Paris. Ils passeront au Château de Cappy toute l’année scolaire 1943-1944.

                « Aussi curieux que cela puisse paraître, témoigne Renée David, nous ne parlions pas des risques et nous n’avions pas peur malgré les difficultés de l’époque. Nous ne nous sommes pas posé de questions. Il fallait le faire. Nous ne pouvions pas dire non. Les cartes d’alimentation des enfants juifs étaient marquées d’un J. Chaque mois, elles donnaient droit à des tickets d’alimentation qui nous étaient remis dans la plus grande discrétion à la mairie du 18e. J’ai eu peur une seule fois : un jour  j’ai accompagné un garçon de treize ans, je lui avais enlevé son étoile jaune mais à la gare du Nord j’ai craint que nous ne soyons pris. À Cappy, pendant la journée, les petits restaient au château tandis que les plus grands allaient à l’école de Verberie, le village voisin. Les enfants avaient conservé leurs noms patronymiques, car nous avions pensé, à tort ou à raison, que cela compliquerait les choses qu’ils se fassent appeler Dupont ou Durand. Heureusement, il n’y a eu aucune difficulté. Il faut souligner que le maire de la commune et les instituteurs ont été parfaits. Ils n’ont jamais posé de questions. À partir de mai 1944, nous avons reçu beaucoup de demandes pour accueillir des enfants juifs. Elles venaient d’autres postes de la Mission Populaire et de paroisses protestantes. Il a donc fallu ouvrir une seconde maison d’enfants. Nous avions trouvé un lieu à Gouvieux, dans l’Oise, mais une rampe de lancement de missiles V1 était installée non loin de la ville, et cela n’était pas rassurant. Il a fallu déménager et ramener tout le monde à Cappy en juillet 1944. Le jour de la Libération, le 31 août 1944, il y avait cent trente-cinq personnes au château, dont quatre-vingt-sept enfants et adolescents, et quelques adultes.  » conclut Renée David.

                Tous furent sauvés.

La Maison Verte s’inscrit toujours dans des engagements de solidarité avec les personnes victimes  d’opression et de discrimination, et dans la lutte contre la montée en puissance des violences homophobes, racistes et xénophobes. 

1960 : L’empreinte de Le Corbusier

En 1873, c’est boulevard Ornano, dans l’arrière-salle d’un café, que s’ouvre ce qui s’appelait à l’époque la « boutique d’évangélisation » . Elle déménage rue de Clignancourt dans une maison aux volets verts : dans le quartier on l’appelle la Maison Verte. En 1905, elle s’installe rue Marcadet dans une grande maison entourée d’un terrain de jeu et devient une véritable maison de quartier. C’est l’emplacement actuel du bâtiment de la Maison Verte. Édifié de 1958 à 1960, les plans du Temple ont été dessinés par un cabinet d’architecte rassemblant des élèves de Le Corbusier qui, on s’en souvient, avait construit plusieurs bâtiments cultuels dans les années 1950.